L’édito d’Aimé Pietri
Ce premier tour de l’élection présidentielle aura, au moins, eu pour effet de redonner des couleurs aux villages que même le printemps ne parvient plus à réveiller. « lls sont venus, ils sont tous là » aurions nous été tentés de fredonner, en l’adaptant, la célèbre chanson d’Aznavour ; là, devant la mairie, sous le drapeau tricolore quelquefois flanqué du drapeau blanc à tête de maure et du flag étoilé européen. On se serait cru un jour d’été lorsque les maisons, aujourd’hui silencieuses, retentissent de mille bruits familiers. Oui mais, bien avant le dépouillement, les « paisani » de fortune ont claqué la porte au nez des derniers habitants et filé vers le littoral retrouver leur vie quotidienne qui n’a rien à voir avec celle de naguère. Ils étaient venus signer de leur présence une promesse de retour, demain ou plus tard, lorsque l’occasion se présentera. Malheureusement les élections ne sont pas saisonnières et le village aura eu le temps d’agoniser, de mourir peut-être, avant de revoir ses enfants perdus. Cela n’empêchera pas les optimistes d’envisager n’importe quel repeuplement, n’importe quelle densité humaine et même -pourquoi pas ?- un programme exceptionnel destiné à favoriser un déplacement de population vers l’intérieur en état de désertification. On peut rêver. Mais le rêve parviendra-t-il à occulter la réalité ? Et faudra-t-il attendre une élection ou quelques petites semaines d’été pour offrir aux villages un bonheur éphémère ? Alors que le pire se profile à leur horizon.