Il n’est désormais plus une semaine sans que les commandos cagoulés de la police n’arrêtent en Corse des personnes soupçonnées d’être impliquées dans d’anciens règlements de compte. Les résultats sont pour le moins décevants comme on peut s’y attendre pour des opérations menées des mois et des mois après les faits reprochés. Le plus vraisemblable est que la JIRS est aujourd’hui en mal de véritables victoires. Le procès de Jacques Mariani démontre certes l’extraordinaire cynisme de l’individu jugé mais aussi la difficulté pour la justice à démontrer la réalité du racket dès lors que les "victimes" sont consentantes. L’agitation de la JIRS poursuit vraisemblablement deux objectifs : démontrer d’abord qu’elle n’est pas sensible à la campagne contre les juridictions d’exception qui, en Corse, gagne du terrain. La grève de la faim de Guy Orsoni, celle de son père bientôt relayée par d’autres personnes, risque fort de devenir pour la presse continentale un sujet à traiter. Le travail exceptionnel de la LDH participe de cette montée en puissance. Mais la JIRS est aussi un outil au service d’une politique. Créée par Nicolas Sarkozy elle se devait bien d’apporter un peu d’eau à son moulin et à son tournant vers l’extrême-droite. Le président candidat va bientôt à nouveau fouler le sol de notre île. La JIRS lui offre l’opportunité de confondre une fois encore les présumés innocents et les présumés coupables. Pour le comité Vérité Justice comme pour la LDH il ne s’agit pas encore une fois de contester la légitimité des opérations de police pas plus que celle des enquêtes de justice contre le grand banditisme (bien au contraire) mais de mettre en exergue les dérogations au droit commun et d’exiger que lorsque les dossiers sont vides (comme c’est le cas pour Guy Orsoni ou Lisandru Plasenzotti) la libération des personnes détenues. Nous publions ci-dessous in extenso la lettre d’Alain Orsoni annonçant sa décision de se priver de toute nourriture jusqu’à la libération de son fils.
GXC
Privé de deux de mes enfants par la faute de la JIRS
Le 3 Juin 2009, un commando envoyé par le juge Choquet de la JIRS Marseille investissait la maison dans laquelle je vis à Vero. Après cinq jours de garde à vue pendant lesquels je me suis expliqué sans détours devant les enquêteurs, j’ai donné la preuve irréfutable de mon innocence. Malgré cela, ce magistrat m’a placé en détention pendant dix mois ! Je ne dois ma liberté qu’à la mobilisation qui a accompagné une grève de la faim sans concessions. Ce jour-là, pour la première fois de ma vie, j’ai supplié cet homme de ne pas m’écrouer afin d’épargner Alexandra, ma fille cadette âgée de 7 ans dont j’ai la garde. Sa mère, atteinte de troubles mentaux, vivait à l’étranger… On m’a pris ma fille chérie et je ne l’ai plus jamais revue. Sa mère est recherchée par Interpol et je reste aujourd’hui encore dans l’attente de la revoir un jour. Je sais seulement qu’elle se trouve actuellement à Cuba, qu’elle a été séquestrée au Mexique et qu’elle est déscolarisée depuis 31 mois ! Le 10 juin, mon fils Guy, apprenant mon placement en détention, décidait de ne pas faire confiance à la JIRS et se mettait en fuite. On me refuse tout permis de visite depuis son arrestation. Je me trouve donc totalement privé de deux de mes enfants. Aujourd’hui, alors que Guy a lui aussi apporté la preuve indiscutable de son innocence, que les prétendues accusations contre lui ont été réduites à néant par l’instruction, la JIRS refuse de le libérer comme l’ont été tous ceux qui avaient été mis en cause dans ces mêmes affaires par de faux témoins, anonymes ou sous X.
Des méthodes dignes des régimes totalitaires
Pire, on utilise à son encontre des méthodes dignes des pires régimes totalitaires y compris une forme de torture utilisée à Guantanamo consistant à enchaîner le détenu transféré aux mains et aux pieds le tout lié par un lien transversal. On lui sangle les bras jusqu’à lui couper la circulation sanguine. On l’aveugle au moyen d’un bandeau et on l’affuble d’un casque afin de l’assourdir. Guy a décidé de refuser ces méthodes inhumaines et dégradantes utilisées par une juridiction qui bafoue le droit et la loi dans le but de le briser. Il a donc entamé une grève de la faim le 13 Février afin d’être traité en toute justice et pour que son innocence soit reconnue. Parce que je suis son père, j’ai choisi de le rejoindre dans cette action au terme de laquelle se jouent sa santé et sa vie.
Il nous reste notre détermination
Je sais que nos chances sont faibles face à un magistrat qui possède tous les pouvoirs tout en ne risquant aucune sanction, face à une juridiction d’exception aveugle qui ne cherche plus aujourd’hui qu’à sauver les apparences et refuse de reconnaître ses erreurs. J’agis ainsi parce que la grandeur d’un homme ne se mesure pas à son statut administratif mais à son attitude face à l’injustice, parce que les citoyens doivent savoir ce qui se pratique aujourd’hui en France au nom du peuple français, en leur nom. Pour répondre au mépris et à l’acharnement d’un juge qui, fort de son pouvoir, ne s’embarrasse d’aucun scrupule, il ne nous reste que notre détermination.
J’irai jusqu’au bout…
Il est inutile d’en appeler à la conscience ou au sens moral de ces magistrats qui pratiquent l’exception jusque dans leur conception de la morale. Mais nous pouvons leur démontrer que le sens de l’honneur et le désir de vérité sont des moteurs plus puissants que la haine, l’acharnement, ou la poursuite de promotions futures… J’irais donc au bout de mon engagement que je prends aujourd’hui. Que Monsieur Choquet en soit persuadé. J’en appelle enfin à la solidarité de tous ceux qui pensent que dans le contexte actuel de crise sociale et économique une justice véritable est plus que jamais nécessaire comme est nécessaire la préservation des acquis de justice qui fondent l’état de droit.
ALAIN ORSONI