La détérioration de la sécurité publique, de la vie collective et du respect d’autrui devrait inquiéter les décideurs administratifs et politiques. Or, apparemment, ils restent zen.
Les récents épisodes de délinquance survenus à Bastia, mais aussi des faits plus banals et moins pris en compte par les médias, confirment que la Corse risque d’entrer dans la spirale de la violence urbaine. S’ajoutant aux attaques à main armée contre des commerçants ou des particuliers, les cambriolages, les vols, et les larcins ainsi que les trafics de toute sorte se multiplient. Les vitrines brisées, les véhicules détériorés ou incendiés, les tags, les attroupements aussi bruyants qu’alcoolisés, les dégradations de mobilier urbain, les « petits » rackets, les injures à l’encontre des personnes âgées et les insanités visant des femmes, deviennent monnaie courante. Cette détérioration de la sécurité publique, de la vie collective et du respect d’autrui devrait inquiéter les décideurs administratifs et politiques. Or, apparemment, ils restent zen. Alors que la population est excédée ou préoccupée par des paroles et des actes qu’elle considère comme autant d’agressions, les autorités administratives et politiques continuent de relativiser. On nous serine que l’on aide et mobilise le milieu associatif. On nous rebat les oreilles de l’action menées par les éducateurs. On nous la baille belle avec le nom ou le sigle de structures censées insérer, intégrer, rendre citoyen(ne), développer l’esprit civique, solidariser, éduquer…
Des recettes devenues inopérantes
La réalité est que tout cela n’est plus en mesure de répondre au développement de l’irrespect et de l’insécurité. Pas plus d’ailleurs que ne le font les critiques de certains qui s’invitent à la table de la vingt-cinquième heure. Conçues pour canaliser la misère sociale ordinaire, les « incivilités » et la proportion de délinquance qui est le lot de toute société, les recettes soft ne suffisent plus à traiter ou même endiguer la vague montante de la violence urbaine. De plus, tout en étant inopérantes, elles ont l’inconvénient majeur de faire croire que « l’on en fait trop pour ces gens là ». Il serait donc temps de sortir de l’autisme et de se dire que la situation est grave. Au lieu d’essayer de se rassurer en se cramponnant à des solutions d’hier, il conviendrait d’en rechercher de nouvelles. Et, en attendant, car apporter des réponses prend du temps, il devient urgent de ne pas nier ou écarter les demandes. Ainsi, afin prendre en compte le malaise ambiant et de prévenir de désastreuses réactions épidermiques, il est essentiel de rassurer un peu les « braves gens » en leur donnant le sentiment que l’on prend en considération leur inquiétude ou leur peur. Ce qui suppose, par exemple, d’ajouter à la palette des politiques locales, le recours à des polices municipales véritablement formées à comprendre et traiter les actes graves d’incivilité et d’irrespect, ainsi que la « délinquance de proximité ». Ce recours est d’autant plus nécessaire que la police nationale a été délestée de ses missions « de proximité » et que ses effectifs ont fondu comme neige au soleil. Même chez nous, il est bel et bien révolu le temps du policier municipal cantonné à verbaliser les autos mal garées et à faire traverser les enfants. A l’horloge de la violence urbaine, minuit vient de sonner…
Alexandra Sereni