Le Collectif contre les assassinats et la loi de la jungle
Une initiative c i t oyenne bienvenue
Un Collectif Contre les assassinats et la loi de la jungle a vu le jour en Corse. Son appel est dirigé vers les Corses dans leur ensemble. C’est une initiative citoyenne qui vient en complément de la Commission dirigée par Dominique Bucchini au sein de la CTC.
Il n’y a pas de fatalité
Les premiers signataires de l’appel ont visiblement tenu à mettre une frontière entre les propos du ministre Valls et la lutte effective de citoyens corses contre un mal qui ronge notre société : la violence. " Les assassinats et les tentatives d’assassinats continuent… D’autres violences empoisonnent notre vie quotidienne… Nous ne l’acceptons pas… Il convient de le signifier collectivement… Il n’y a pas de fatalité… C’est notre avenir qui est en jeu. C’est à nous, citoyens, qu’il revient d’en décider…" La pluralité des signataires dont on trouvera le nom en bas de cet article est déjà un gage de réussite. Car c’est toute la société civile corse qui est symboliquement incarnée dans sa diversité professionnelle et politique. Artistes, journalistes, avocate sans oublier un responsable de la Ligue des droits de l’homme et Noëlle Vincensini fondatrice d’Avà Basta, ont posé la première pierre de ce qui pourrait bien être la première révolte contre la dictature de la violence ou plutôt des violences. Une réunion s’est tenue à Corte qui a montré les dangers que devra éviter le collectif. Le premier est une division de ce phénomène entre bonne et mauvaise violence. Il sera tentant pour les nationalistes d’expliquer que la mauvaise violence est celle du droit commun ou de l’absence de règles urbanistiques et tenter de relativiser la violence clandestine. Mais l’inverse est aussi vrai. Jean-Claude Acquaviva, dans un Cuntrastu récent, a mis en exergue la différenciation entre la violence d’état nécessaire (une justice banalisée au service des citoyens) et la violence d’état débordante que l’on trouve aujourd’hui dans les moyens d’exception mis au service d’institution tel que la justice antiterroriste ou les JIRS.
Convaincre pour emporter la partie
La Méditerranée est la contrée du double langage. Il ne fait aucun doute que beaucoup détestent la violence lorsqu’elle s’exerce contre leurs intérêts mais l’apprécient lorsqu’elle les sert directement ou indirectement. La responsabilité est globale. Lorsque nous acceptons un acte criminel au prétexte que la victime l’avait bien cherché ou mérité, nous devenons complices de la violence. Pierre Poggioli peut affirmer dans son récent ouvrage le danger mafieux. Il doit se rappeler qu’en 1989, il fut un pionnier et dénonça la dérive mafieuse du MPA-FLNC Canal habituel avant de s’allier avec ce groupe après la rupture de l’ANC avec Corsica nazione. Par la suite, il a longtemps milité avec des groupes qui sont aujourd’hui soupçonnés d’avoir franchi la ligne blanche entre nationalisme et affairisme. Or contre la violence, on ne saurait être à géométrie variable. C’est une question de principe. Et pour convaincre une opinion publique échaudée, il faudra se montrer sans concession pour tout type de violence minoritaire.
Violence affichée contre violence clandestine
Et c’est bien là que le débat risque d’achopper. Au Brésil, c’est la violence de rue qui a permis un recul du pouvoir sur des questions de vie quotidienne. Autant, il est contre-productif de se cacher derrière une cagoule pour affirmer la justesse d’un combat, autant on ne saurait nier aux citoyens le droit de se révolter. Affronter la police pour des raisons sociales n’est absolument pas scandaleux en soit. Ce qui l’est c’est de confisquer à la société civile ce droit à la révolte en s’arrogeant le titre de représentant anonyme du peuple ou encore de condamner toute violence au nom d’un principe qui ne saurait se justifier quand les plus riches se goinfrent au détriment d’une masse de malheureux de plus en plus nombreuse. Quant à la voyoucratie, elle doit être combattue sans faiblesse car elle est tout simplement l’expression bestiale du fascisme et de la loi du plus fort. Le Collectif saura qu’il a remporté une première bataille quand des élus, des entrepreneurs (à l’exemple de ceux d’Evisa), bref des citoyens porteront plainte devant les tribunaux pour menaces et rackets en désignant leurs agresseurs de quelque bord qu’ils soient.
GXC
Les signataires de l’appel : Jean Claude ACQUAVIVA (artiste), Jacques FUSINA (ancien universitaire), Philippe GATTI (ancien bâtonnier), Isabelle LUCCIONI (journaliste), Joselyne MATTEI-FAZI (présidente de l’association des maires de la Corse-du-Sud), André PACOU (Ligue des droits de l’homme), Gaston PIETRI (prêtre), Linda PIPERI (ancienne bâtonnière), Patrizia POLI (artiste), Noëlle VINCENSINI (présidente d’Avà basta), Ange-Pierre VIVONI (président de l’association des maires de la Haute Corse) »