Pour réduire son déficit, la Sécu rembourserait moins les médicaments réduisant les souffrances causées par les pathologies les plus graves. Consternant !
Un bon conseil : pour l’avenir, prévoyez d’être jeunes, beaux, riches et en bonne santé, jusqu’au moment où le Bon Dieu décidera de vous rappeler à lui. A défaut, vous connaîtrez l’Enfer avant même d’être passé de vie à trépas, et le ferez aussi endurer à votre entourage. En effet, les chasseurs de coûts de la Sécu sont à nouveau de sortie. Avec le soutien - déclaré ou honteux - du pouvoir en place, ils travaillent à une énième action visant à « réduire le déficit ». Vous noterez en passant que « réduire » a désormais remplacé « gommer » Ce qui veut dire que, même amère, la prochaine potion ne serait pas la dernière.
Ni correct, ni poli
Des potions amères, ces dernières années, nous en avons avalées quelques unes ; la dernière en date étant les franchises. Mais celle qui est aujourd’hui proposée, est plus que marquée d’amertume, elle est tout simplement « dégueulasse » ; pour reprendre un mot cher à Fadela Amara. J’admets que ce mot n’est ni politiquement correct, ni poli. Mais il est des circonstances où il convient d’abandonner les convenances et « d’appeler un chat un chat ». Proposer que l’assurance maladie - l’organisme permettant que chacune et chacun d’entre nous puisse compter sur la solidarité de son voisin pour retrouver la santé - réduise le taux de prise en charge des médicaments traitant des affections de longue durée, relèverait en effet de l’horreur. Cela signifierait dire à un diabétique, un cancéreux ou une personne souffrant d’une maladie cardiaque grave, que la société se fiche de son sort. Cela suggèrerait même qu’être malade est une faute ou du moins une volonté de casser les pieds à son prochain. Il faut n’avoir jamais eu un malade dans son entourage ou son voisinage pour oser envisager ce cas de figure ! En effet, parler de « médicaments de confort » quand on évoque des médicaments « anti-douleur » ou réduisant les effets indésirables de traitements lourds, n’est pas faire preuve d’humanité. Vivre le confort, c’est être passé du stade de la satisfaction de besoins vitaux à celui de la recherche d’un peu de superflu et de bien-être. Or, administrer un « anti-douleur » n’est pas du domaine du superflu mais du vital ; cela n’est pas procurer au patient du bien-être mais simplement lui permettre de moins souffrir.
Deux mauvaises directions
D’aucuns s’imaginent sans doute que faire appel aux mutuelles serait la solution pour réduire les remboursements et rester humains. Rien n’est plus faux. D’abord, nombre de Français, souvent les plus pauvres, ne disposent pas de ce type de couverture maladie. Ensuite, accepter que le remboursement de médicaments vitaux concernant des millions de patients ne soit plus assuré par la solidarité collective mais par l’assurance individuelle, irait dans au moins deux mauvaises directions. La première : cela fragiliserait le minimum de solidarité collective qui fait que notre pays n’appartient pas à ces Etats développés (les USA par exemple) où, seuls ceux qui ont les moyens de payer, ont le droit réel d’être soignés et de moins souffrir. La seconde serait d’ouvrir grand le porte à la privatisation de l’assurance maladie dont rêvent tant de décideurs pour qui la société ne peut être régie que par le profit et pour lesquels un pauvre, un faible, un vieux ou un malade s’appelle un « fardeau social ».
Alexandra Sereni