Les actionnaires principaux se félicitent d’un plan de sauvetage qui prévoit la suppression de plus de 500 postes et ne garantit rien.
Le conseil de surveillance de la SNCM a validé un plan stratégique qui conduira à la suppression de 415 postes en 2014 (départs volontaires, CDD non renouvelés) et 100 entre 2017 et 2019 (départs volontaires). L’Etat et VEOLIA, les deux actionnaires principaux de la compagnie, se sont félicités de ce plan de sauvetage. La satisfaction affichée a probablement pour origine qu’il avait été évoqué la nécessité de 600 à 800 suppressions de postes, que la SNCM continuera de relier cinq ports corses à Marseille, Toulon et Nice, et que devrait intervenir un renouvellement des navires (deux en 2016 et 2017, deux en 2018). Selon une approche comptable, il est certes inévitable de se résoudre à ce plan de sauvetage. En effet, la SNCM reste structurellement déficitaire (14 M€ de pertes d’exploitation en 2012). A cela s’ajoute que saisie par la Corsica Ferries, la Commission européenne a condamné la France à récupérer 220 M€ d’aides jugées incompatibles avec les règles de la concurrence. Ce qui pourrait être confirmé en appel. Autre déboire : la délégation de service public 2014/2023 entre la Corse et le continent français n’a pas encore été attribuée à la SNCM car, la jugeant trop onéreuse, l’Assemblée de Corse a rejeté à l’unanimité l’offre de la compagnie. Enfin, l’actionnariat de la SNCM va évoluer. VEOLIA doit reprendre la part de sa filiale Transports TRANSDEV (66%). Mais le plan de sauvetage proposé ne semble pas fiable. Aussi, je ne suis guère optimiste concernant la pérennité de la SNCM.
Les élus PS n’y croient pas
Je suis confortée dans mon inquiétude par le fait que la plupart des élus marseillais, y compris ceux encartés au Parti socialiste, doutent manifestement de l’efficience des mesures dont se félicitent l’actionnaire principal et l’Etat. Le maire UMP de Marseille, Jean-Claude Gaudin, et les présidents PS du département des Bouches-du-Rhône et de la région PACA, Jean-Noël Guerrini et Michel Vauzelle, viennent de cosigner une lettre au Président de la République demandant le soutien de l’État à la SNCM. « Le plan de sauvetage pourrait conduire rapidement au naufrage de l’entreprise si cette décision n’est pas accompagnée d’un plan de redressement sérieux » tonne le premier adjoint UMP au maire de Marseille. Eugène Caselli, président PS de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, affirme : « Je considère que les actionnaires et même l’Etat n’ont pas pris la mesure de la crise économique et sociale qui frappe Marseille. » Tous ces décideurs ont raison de s’inquiéter. Les précédents de ces derniers mois montrent que le pouvoir socialiste n’est guère enclin à agir pour sauver les entreprises en difficulté ou s’opposer aux diktats libéraux de Bruxelles. En outre, le gouvernement ne semble pas disposé à imposer le maintien de la Caisse des Dépôts dans le capital de la SNCM. Ce qui se traduira par un pouvoir dévolu à Veolia qui ne manifeste aucun intérêt pour le développement de l’activité transport maritime. Il est en outre patent que le gouvernement n’exercera aucune pression, pour obtenir l’infirmation de la condamnation de la France à récupérer les aides versées à la SNCM. Enfin, personne ne s’est vraiment engagé à financer le renouvellement de la flotte. Si on ajoute que la Corse n’a pas les moyens de soutenir financièrement la compagnie, et que certains acteurs politiques et syndicaux insulaires espèrent que son naufrage facilitera l’émergence d’une compagnie régionale maritime, la SNCM n’a jamais été aussi menacée dans son existence.
Alexandra Sereni