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Pauvreté invisible

jeudi 20 septembre 2012, par Journal de la Corse

Cela n’est pas parce que nos rues ne sont pas envahies de mendiants que la pauvreté et les inégalités ont été éradiquées. Les régions du Nord et du Sud de la France sont les plus touchées. Et les disparités régionales sont très fortes. La pauvreté mène à l’exclusion sociale. Comme une inéluctable sentence, un cercle vertueux qu’il faut pouvoir briser.

Disparités régionales

Selon une étude de l’Insee, le taux de pauvreté varie de 10,3% en Alsace à 19,3% en Corse. Dans les départements ruraux, la pauvreté frappe plus souvent les personnes âgées. Le chômage, le poids des inactifs, les différences de structure sociale ou familiale sont les principales raisons de ces disparités, réduites par les prestations sociales, qui comptent pour le tiers du revenu disponible des ménages pauvres. L’étude nous apprend également qu’il a peu de lien entre niveau de vie médian et inégalité de niveau de vie à l’intérieur d’un département ou d’une région. En Corse, les disparités sont amplifiées par rapport aux autres régions par le poids important des revenus les plus faibles. Toujours selon l’Insee, 20% des ménages de l’île sont classés comme pauvres.

Seuil de pauvreté

Un Corse sur cinq vit en dessous du seuil de pauvreté. En 2010, le seuil de pauvreté correspond à un niveau de vie de 908 euros par mois (à 60% de la médiane). Avec 20,4 % de la population qui vit au-dessous de ce seuil, la Corse est au 1er rang des régions métropolitaines. Le revenu disponible est calculé après transferts sociaux, c’est-à-dire une fois que les prestations sociales ont été distribuées et que les réductions d’impôt ont été calculées. Dans le classement européen, la France, avec 13,5%, se situe en dessous de la moyenne européenne fixée à 16% (le seuil étant établi à 60% du revenu médian national). Par ailleurs, Eurostat estime à 115 millions le nombre de personnes menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale dans l’UE en 2010, soit 23,4% de la population. Les personnes menacées sont celles dont le revenu est inférieur au seuil de pauvreté et/ou en situation de privation matérielle grave et/ou vivant dans des ménages à très faible intensité de travail. Et la crise n’arrange bien sûr rien, puisque rigueur et précarité s’invitent dans les foyers. Pourtant, Fintan Farrell, Directeur d’EAPN (réseau européen des associations de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale) a souligné que « Des signes indiquent que les décideurs européens reconnaissent qu’une sortie inclusive de la crise oblige à s’attaquer à la pauvreté et aux inégalités et demande un investissement social. Il est temps de passer des mots aux actes ». Pourtant, « L’évaluation des programmes nationaux de réforme (PNR) réalisée par EAPN montre que la plupart des États membres ne prennent ni la réduction de la pauvreté ni la participation des parties prenantes au sérieux » a déclaré Ludo Horemans, Président d’EAPN.

Réformes et modèles sociaux

Selon l’EAPN, les mesures d’austérité génèrent de la pauvreté et minent une reprise inclusive. Le réseau recommande notamment la participation effective des parties prenantes. Revoir les modèles sociaux. En Europe, on distingue habituellement trois types de modèle social contre la pauvreté. Le modèle nordique (Suède, Danemark, Finlande) vise à réduire le nombre de pauvres plutôt que l’intensité de la pauvreté. Il repose sur des prestations sociales universelles, les populations sont peu ciblées, les prestations sont généreuses. Le modèle continental (France, Allemagne, Autriche, Espagne) vise à baisser le taux et l’intensité de la pauvreté. Les prestations complètent celles du système d’assurances sociales et contribuent à sa généralisation. Le modèle des états méditerranéens (Italie, Grèce, Portugal) ne permet pas de diminuer ni le taux, ni l’intensité de la pauvreté car les prestations sociales sont très faibles. Le rôle de la famille est fondamental. Et l’on sait bien que la solidarité n’est plus une valeur si partagée car la précarité a brouillé les cartes. Et la modernité aussi, avec ses nouveaux besoins générés qui ont apporté des factures supplémentaires. Premier public touché : les personnes âgées. Viennent ensuite les familles monoparentales. La prise en compte de la pauvreté ne peut être laissée au seul tissu associatif ou à la solidarité. L’État doit s’impliquer, en tant qu’acteur social. Histoire de réformer le modèle social, et faire bouger les mentalités.

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