Ouvrir ou ne pas ouvrir les magasins le dimanche, tel n’est pas l’unique débat concernant le commerce. La question des profits et du tout rentable a aussi provoqué une vive émotion dans l’opinion publique à la lumière du scandale des lasagne au cheval de Findus. La tromperie économique met au jour un gros problème sur la filière agroalimentaire. De quoi remettre sur le ring les petits commerces contre les grandes surfaces. C’est parfois à un combat de David contre Goliath auquel on assiste.
David vs Goliath
Alors que la densité commerciale s’intensifie sur le territoire et que les consommateurs convergent plus facilement vers les grandes surfaces pour faire leurs courses, les petits commerçants de la Corse-du-Sud peuvent souffler un peu dans cette bataille contre les « géants du commerce ». En effet, l’été dernier, la commission nationale de l’aménagement commercial a annulé deux projets de construction de deux hypermarchés sur la commune de Sarrola Carcopino. Il n’en demeure pas moins que selon une étude de l’Insee, les Français fréquentent de plus en plus les grandes surfaces. Leur place est prédominante dans l’alimentation générale, l’équipement du foyer, l’aménagement de l’habitat et s’affirme dans l’habillement-chaussures ou dans le secteur de la culture, des loisirs et du sport. Les grandes surfaces réalisent souvent un chiffre d’affaires par personne occupée ou par m² plus élevé que les petits magasins mais leur performance dépend aussi beaucoup de l’activité exercée. Cependant les petits magasins gardent leur place dans le paysage commercial, surtout dans l’alimentation spécialisée et l’artisanat commercial ou d’autres secteurs bien spécifiques comme l’optique ou la bijouterie. En Corse, la densité commerciale est de 15 établissements pour mille habitants (le double de la moyenne nationale). Cela s’explique notamment par l’importance du tourisme qui assure tant un surcroît de clientèle et que la viabilité de nombreux établissements. L’enclavement de certaines régions favorise également le maintien des commerces de proximité.
Commerces de détail
Une autre particularité insulaire est que l’île comprend quelque 290 établissements ayant pour activité la vente sur éventaires et marchés. Six sur dix sont spécialisés dans le commerce alimentaire. Le non alimentaire concerne des domaines divers, de la quincaillerie à l’habillement. Par ailleurs, une quinzaine d’établissements assurent la vente par correspondance. Quelques établissements de vente à domicile ou par automate complètent le panorama du commerce insulaire hors magasin. On compte aussi les boulangeries, les pharmacies et les fleuristes. Ces secteurs sont en mutation, notamment concernant leur implantation. Ainsi, on ne comptait plus que 380 commerces d’alimentation générale en 2004, alors qu’il y en avait 144 en 1994. En 2004, selon les chiffres de l’Insee, les Corses pouvaient s’approvisionner dans 1.300 commerces alimentaires ou à dominante alimentaire.
Guerre des prix
En septembre dernier, une « nuit bleue » a eu lieu contre des grandes surfaces à Ajaccio et Bastia. Au moins six supermarchés ont été plastiqués. Il s’agit d’actions symboliques qui posent la question de la place de la grande distribution dans l’économie insulaire et de la compétition entre les enseignes. D’autant que la crise ne fait pas de bien au commerce. Il y a une tension très vive entre la grande distribution et l’industrie agroalimentaire, les fournisseurs se disent étranglés par la guerre des prix à laquelle se livrent les enseignes. Les négociations sur les prix sont de plus en plus tendues. Pour preuve, la déclaration de l’Association nationale des industries agroalimentaires (Ania) à l’issue des négociations commerciales annuelles avec la grande distribution sur les grilles tarifaires : « Les distributeurs, sans aucune exception, se sont montrés sans foi ni loi ». Le contexte économique est favorable à cette guerre des prix que tous se livrent. Les promotions se multiplient comme les petits pains. De quoi faire dire à l’Ania qu’« En 2012, ce sont près de 5.000 emplois qui ont disparu et cette année 5.000 autres disparaîtront si les pouvoirs publics ne font rien de concret ». D’où une forte demande de modifier la Loi de modernisation de l’économie (LME). Les boutiques qui ont du mal à payer leur loyer pour rester en centre-ville ne peuvent que s’associer à cette grogne. Il n’y a pas que pour le consommateur que la crise est dure.
Maria Mariana