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L’invité Michel Stefani candidat du Front de gauche en Haute-Corse

jeudi 19 avril 2012, par Journal de la Corse

Ce n’est pas la première fois que Michel Stefani affiche sa candidature à des législatives dans la Ière circonscription de la Haute-Corse, toujours sous les couleurs du parti communiste. Cette fois-ci il y a une nuance puisque son drapeau n’est – comme le dit Baudelaire- « ni tout à fait le même ni tout à fait un autre ». Mais il le porte tout aussi fièrement. Avec en plus une nouvelle fonction, puisqu’il a été appelé à cornaquer les chemins de fer corses, ce qui n’est pas une mince affaire. En attendant il descend dans l’arène avec la seule mission de recueillir le plus de voix possibles au premier tour, tout en faisant valoir ses engagements. Et comme il n’a pas encore son avenir politique derrière lui, il aura son rôle à jouer dans les tout prochains scrutins et les autres qui se profilent déjà à l’horizon de cette île et de son continent.

Le premier tour de la présidentielle s’approche, Jean Luc Mélenchon continue de monter dans les sondages. La droite s’en réjouit, à quoi attribuez-vous cela ?

Si la progression de Jean Luc Mélenchon et du Front de gauche continue c’est que notre campagne, son contenu, nos propositions répondent à une attente. La droite s’en réjouit, nous nous faisons tout pour qu’elle perde. Toutes les enquêtes d’opinion montrent qu’un électorat jeune, populaire et nouveau constitue pour une bonne part l’électorat du Front de gauche. Par conséquent c’est toute la gauche qui gagne et une nouvelle perspective devant nous.

Mélenchon fait les plus gros meetings, même en Corse, est-ce à dire que le PC retrouve grâce à lui des couleurs ?

En tout cas les communistes peuvent être fiers d’avoir fait ce choix et de s’être engagés avec détermination dans la campagne dès le mois de septembre. A la Fête de l’Humanité nous avions déjà senti avec la vente de plusieurs dizaines de milliers de programmes « l’Humain d’abord » que quelque chose bougeait en profondeur.

Justement on vous reproche de faire des propositions inapplicables ?

Généralement ceux qui nous font ce reproche se contentent de leur vie. Sans doute n’ont-ils pas de souci d’emploi, de logement, de santé, de pouvoir d’achat, d’éducation pour leurs enfants. La virulence avec laquelle Madame Parisot et le MEDEF s’attaquent à nos propositions est, de ce point de vue, éloquente. De ce côté-là on ne se trompe pas. Paradoxalement, cela renforce la crédibilité de nos propositions.

Le SMIC à 1700 €, les 35 heures ou la retraite à 60 ans cela ne serait pas sans incidence sur l’économie ?

On peut aussi considérer que les milliards de dividendes versés aux actionnaires des grands groupes, les milliards d’allègements de charges, les milliards de cadeaux fiscaux au plus fortunés, les milliards donnés aux banques ces derniers mois pourraient être utilisés autrement et servir à satisfaire ces exigences sociales légitimes

Quand c’est le PS qui est en désaccord avec vous, vous n’êtes pas inquiet ?

Si le PS en reste à ce que certains de ses dirigeants ont dit, à savoir : « notre programme est à prendre ou à laisser » cela sera problématique parce que cette intransigeance met en cause la nature et la portée du changement. Battre la droite c’est nécessaire mais réussir à gauche l’est tout autant.

Et la Corse n’est-elle pas trop absente de ce débat ?

Dire cela revient à considérer que l’urgence sociale n’y existe pas que la planification écologique que nous préconisons pour créer de l’emploi, imaginer un développement agricole et industriel adapté, construire des logements sociaux, améliorer la protection sociale et sanitaire, n’y aurait aucun intérêt. Or ici comme dans le reste du pays les priorités sont l’emploi, le pouvoir d’achat, le logement, la santé, l’éducation, le service public, l’environnement.

Vous êtes d’accord avec François Hollande qui refuse d’ouvrir une nouvelle étape de réforme institutionnelle ?

Ces 20 dernières années, chaque période de grandes mobilisations sociales, 1989 et 1995, ont été suivies de réformes institutionnelles. Elles ont fait de la Corse la région la plus décentralisée avec de nombreuses compétences. Il faut regarder comment celles-ci ont été exercées à plus forte raison quand la précarité, la pauvreté, la cherté de la vie ne cessent de s’aggraver. Par conséquent avant de dire il faut une réforme institutionnelle il faut dire pour quoi et pour qui la faire. Et surtout il faut que le peuple ait le dernier mot.

Comme en 2003 vous êtes pour le référendum ?

C’est ce que nous avons défendu lors des Assises du Logement et du Foncier à propos de la notion de résident et de citoyenneté corse. A notre grande surprise nous avons vu notre amendement repoussé par tous les autres groupes de l’Assemblée de Corse.

N’est-ce pas contradictoire avec votre position sur la langue ?

Non, l’Assemblée de Corse a voté à une très large majorité notre proposition de co-officialité. Nous y avons défendu le principe d’un bilinguisme assumé en ayant conscience de la nécessité de modifier la constitution. Il ne s’agit pas d’opposer des personnes d’origine différente mais de permettre l’épanouissement de chacun dans le respect de l’autre, de maintenir un cadre commun qui ne débouche pas sur des discriminations notamment dans le droit du travail et plus largement dans tout ce qui fait la vie quotidienne.

François hollande propose de transférer une partie de la fiscalité aux régions est-ce que cela permettrait de sauver les Arrêtés Miot ?

L’enjeu c’est moins de sauver l’Arrêté Miot que de définir une fiscalité juste. Ce n’est pas le cas quand les gros patrimoines échappent à l’impôt sur les successions. C’est le sens de l’amendement que j’ai fait adopter par l’Assemblée de Corse. Justice sociale et justice fiscale doivent se conjuguer. Au delà il faut repenser la fiscalité mettre fin aux cadeaux aux plus fortunés, privilégier la solidarité et la péréquation nationale, s’extraire de la logique libérale de compétitivité des territoires et stopper la réforme Sarkozy-Fillon des collectivités locales.

Le climat de violence a conduit le président Bucchini à mettre en place une commission. Est-ce suffisant ?

Face à la situation préoccupante s’il ne l’avait pas fait on le lui aurait reproché. Il l’a fait en sachant que nous n’allions pas nous substituer à la justice et à la police mais, en tant qu’élus, réfléchir pour dégager des pistes politiques et démocratiques susceptibles de générer un sursaut populaire et citoyen.

La JIRS est beaucoup critiquée qu’en pensez vous ?

Il faut faire très attention à ne pas assimiler ceux qui se rendent coupables d’actes délictueux graves et ceux qui doivent les interpeller. Nous voyons des assassinats terrifiants et une dérive mafieuse à combattre. Cela n’autorise pas à enfreindre la loi pour faire respecter l’Etat de droit. Pour autant, on n’interpelle pas une personne fichée au grand banditisme comme un voleur d’orange. En ce sens Eva Joly a raison, la JIRS n’a rien d’exceptionnel.

Depuis trois mois vous êtes à la tête du Chemin de fer de la Corse que pouvez vous dire de cette expérience ?

Je pense que la Collectivité territoriale a bien fait d’en faire un outil central de l’aménagement du territoire pour combiner une offre de transport multimodale conforme au développement durable. La modernisation du réseau doit se poursuivre et l’Assemblée de Corse sera amenée prochainement à se prononcer sur une nouvelle programmation d’investissements nécessaires pour se projeter dans les 30 ou 40 prochaines années.

(Interview réalisée par Jean-Noël Colonna)

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