Quarantième anniversaire de la mort de Charles De Gaulle. Les élites et le peuple dans la commémoration. Le souvenir du Sauveur, du chef de guerre et de l’homme d’Etat, au cœur des cérémonies. D’autant plus émouvantes que les survivants de l’épopée se font rares. On se souvient, les médias aidant, du « Paris outragé ! Paris blessé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France. » Discours prononcé à l’Hôtel de Ville de Paris le 25 août 1944. Devant la foule en liesse. Et les Corses se souviennent de ce 8 octobre 1943 à Ajaccio et de la place du Diamant fleurie du V de la victoire et de la croix de Lorraine. Ils se rappellent la haute silhouette, les bras levés, et du début de sa harangue : « Au milieu de la marée d’enthousiasme national qui nous soulève tous aujourd’hui…. La Corse que l’héroïsme de sa population et la valeur de nos soldats, de nos marins et de nos aviateurs viennent d’arracher à l’envahisseur au cours de la grande bataille que les alliés mènent en ce moment, la Corse a la fortune et l’honneur d’être le premier morceau libéré de la France. Ce qu’elle a fait éclater de ses sentiments et de sa volonté à la lumière de sa libération démontre ce que sont les sentiments et la volonté de la nation tout entière. » Et le général devenu prophète annonçait avant de se mêler à la foule enthousiaste : « C’est d’Ajaccio que nous voulons crier notre espoir de voir la mer latine redevenir un lien au lieu d’être un champ de bataille. Un jour viendra où la paix, une paix sincère, rapprochera depuis le Bosphore jusqu’aux colonnes d’Hercule, des peuples à qui mille raisons aussi vieilles que l’histoire commandent de se grouper afin de se compléter. » Et les Corses ont aussi gardé en mémoire le témoignage ardent « de l’amour et de la fierté de la France » qu’il leur avait adressé dans un discours radiodiffusé prononcé à Alger le 23 septembre 1943, lorsque « après trois ans d’odieuses oppressions et d’épreuves indicibles, le Corse française, la Corse si aimée et si admirée, paraît à son tour au soleil de la libération. » Parmi les hommes qui suscitèrent ces paroles d’admiration, comment pourrait-on aujourd’hui, ne pas associer à cet anniversaire de la mort du général la disparition, ces jours-ci, du dernier survivant de la mission « Pearl Harbour », Laurent Preziosi. Il était âgé de 99 ans. L’équipe « Pearl Harbour » comprenait le chef de bataillon Roger de Saulle, chef de la mission, Toussaint Griffi et l’opérateur radio Pierre Griffi, et Laurent Preziosi tous trois lieutenants. Pierre Griffi et son cousin Toussaint étaient originaires de Lugo di Nazza, Laurent Preziosi était, lui, originaire de Taglio Isolaccio. Ils avaient pour mission de recueillir des renseignements et de pourvoir en armes la Résistance. Pierre Griffi sera pris et fusillé à Bastia par les Chemises noires le 18 août 1943. Il avait transmis à Alger plus de 99 messages. Ces messages ont servi au transport des armes livrées à la Résistance par le sous-marin « Casabianca ». L’action de ces hommes est devenue légendaire. Laurent Preziosi participa ensuite au débarquement en Provence et à la libération de Marseille. Marc’Aureliu Pietrasanta