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Corruption : la paille et la poutre

jeudi 14 février 2013, par Journal de la Corse

Une organisation non gouvernementale a demandé au gouvernement de faire de la lutte contre la corruption une « Grande cause nationale 2013 ».

La société corse est souvent décrite comme tolérante et même complice en matière de corruption. Des médias parisiens et des politiciens continentaux ne manquent jamais l’occasion de nous clouer au pilori, nous accusant d’inféodation consentie à la loi du silence et même de complaisance. Je conviens que l’actualité leur fournit des opportunités de déverser leur fiel. L’affaire dite « des gîtes ruraux » représente bien sûr du pain béni pour nos détracteurs. D’autant que d’autres dossiers « brûlants » sont annoncés. Cependant, la réalité qui prévaut de l’autre côté de l’eau, devrait inciter les pourfendeurs de Corses à lire ou relire l’Évangile de Luc ou Les fables de La Fontaine. En effet, découvrir ou redécouvrir la parabole de la paille et de la poutre présente dans ces deux écrits, inviteraient peut-être les plus intelligents d’entre eux, ou les moins malhonnêtes intellectuellement, à des révisions de leurs façons de présenter la Corse et ses habitants.

Une France de corrompus ?

A la fin de l’an passé, une ONG (organisation non gouvernementale) reconnue pour son sérieux et son indépendance, Transparency International, a demandé au gouvernement de faire de la lutte contre la corruption une « Grande cause nationale 2013 » et exposé des exemples significatifs. Transparency a par exemple mentionné des condamnations d’élus locaux pour prise illégale d’intérêts en matière d’urbanisme, pour perception d’avantages en nature contre l’attribution de marchés publics, pour abus de biens sociaux, pour recours à des emplois fictifs. Transparency a aussi déploré que les faits soient trop souvent relativisés ou dissimulés, dénonçant à partir de rapports de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) et du Conseil de l’Europe : « le manque d’indépendance de la justice financière » et « une législation inadaptée à la poursuite et à la sanction de la corruption ». Transparency a par ailleurs souligné la défiance des Français : « Les partis politiques sont perçus comme l’institution la plus touchée par la corruption. Suivent les entreprises, le Parlement (l’Assemblée nationale et le Sénat), les médias et les administrations. »

Peu glorieuses réalités

L’OCDE met aussi en cause la quasi-impunité dont bénéficieraient les entreprises françaises dans les affaires de corruption transnationale. La Convention internationale ayant pour objectif de condamner fermement les ressortissants des pays signataires qui auraient soudoyé des agents publics étrangers, signée par la France en 2000, ne serait guère prise en compte par les juges hexagonaux. Seules 33 procédures auraient été initiées et 5 condamnations prononcées. Il est toutefois vrai qu’en matière de corruption transnationale, l’exemplarité n’est guère de mise. De 1999 à 2010, le nombre de personnes physiques et morales sanctionnées pour des affaires de corruption transnationale n’aurait été que de 75 aux Etats-Unis, 39 en Italie, 36 en Allemagne. Il n’est bien sûr pas question de considérer que l’on puisse se prévaloir de ces peu glorieuses réalités pour éluder, justifier ou excuser la corruption sévissant dans notre île. En revanche, il y a matière à considérer que ceux qui prennent plaisir à nous dénigrer depuis Paris, feraient bien de se taire ou du moins de moduler ou modérer leurs propos.

Alexandre Sereni

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