La dépolitisation de la presse au profit de considérations périphériques sur l’air du temps n’est pas sans influence sur la perception du « problème corse » et sa « trivialisation ». La vision policière de l’histoire et de la société en fait intégralement partie. En témoignent le succès des articles consacrés « aux truands, aux cagoulés et aux mafieux de tout acabit » Un bon article croustillant sur « la Bande du Petit Bar » ou sur la « dérive criminelle de la clandestinité », même s’il fait la part plus belle au phantasme qu’à la réalité, aura toujours plus de succès qu’une analyse politique sur les raisons objectives de l’existence d’un nationalisme corse et les manipulations médiatiques dont il peut faire l’objet. Quelques confidences bien placées feront la "puissance" du journaliste auto institué et deux ou trois lapalissades forgeront une réputation de spécialiste de la Corse dans les médias. Une constatation valable sur le continent mais surtout en Corse où la capacité d’auto dénigrement et d’exploration des fonds de poubelles est proportionnelle à nos velléités de réalisation. Selon la métaphore du train qui arrive à l’heure, le propre de l’information n’est-il pas justement de parler de ce qui ne marche pas ? Une certaine fascination pour ce qui est sensé constituer la face cachée de l’île, permet ainsi à tout un chacun de dire tout et n’importe quoi, sans retenue et sans condamnation. Inutile de s’interroger sur le fait que la Corse n’a pas plus de raison de s’avancer masquée que d’autres régions similaires, son existence même est de l’ordre du mystère et seule l’exploration de ses bas fonds pourra permettre de le révéler. Sentiments anti nationaliste et anti corse vont ainsi de paire dans la même vision policière de la réalité accroissant la victimisation dont chacun se sent ici la cible privilégiée. Faire du sensationnel donne toujours l’illusion d’exister et la malhonnêteté intellectuelle permet également au passage de régler sous couvert de journalisme des problèmes de relation personnelle à la Corse sans avoir besoin de les analyser. Ainsi va l’information sur la Corse et en Corse entre mensonge, phantasme et réalité, entre règlement de comptes et naïveté, boursouflure de l’ego et trivialité.
J-N.C