A Bastia, si le front législatif reste calme, celui de la bataille municipale est d’ores et déjà très animé.
Gilles Simeoni sera-t-il candidat lors des prochaines élections législatives ? Le sera-t-il dans la circonscription de Bastia ou celle de Corte Balagne ? Jugera-t-il plus opportun d’affronter un sortant UMP (Sauveur Gandolfi-Scheit) et Jean Zuccarelli, candidat du Parti radical de gauche et du Parti Socialiste, ou le président du Conseil exécutif Paul Giacobbi et la candidate Ump Stéphanie Grimaldi ? Nul n’est aujourd’hui en mesure de répondre à cette question. l’intéressé lui-même a-t-il en son for intérieur tranché ? Rien n’est moins sûr. Aller au combat à Bastia est tentant. Se colleter avec deux hommes forts de la région bastiaise et obtenir un bon résultat seraient de nature à renforcer la dynamique autonomiste en vue des élections municipales. De plus, un mal-être de la droite si Nicolas Sarkozy est défait (Sauveur Gandolfi-Scheit est l’homme clé du Président sortant et de l’Ump en Haute-Corse) et les effets négatifs des dissensions au sein de l’équipe municipale bastiaise, sont des hypothèses favorables à prendre en compte. Batailler du côté de la Balagne, de Corte et du Fium’Orbu est également tentant. L’ancrage des votes autonomiste et siméoniste y est ancien et à des niveaux élevés. En outre, affronter sur son terrain le « patron » de la Collectivité territoriale et réaliser un bon score représenteraient une clarification et crédibiliseraient une ambition : l’autonomisme se poserait en alternative politique de l’actuelle majorité territoriale ou, a minima, en partenaire dominant d’une prochaine majorité. Enfin, Paul Giacobbi ayant quelques ennemis déclarés à gauche et ayant eu besoin des suffrages nationalistes pour l’emporter en 2007, pourrait se retrouver en position difficile et être battu dans le cadre d’une triangulaire ou d’un duel par un de ses deux adversaires (Gilles Simeoni ou Stéphanie Grimaldi). Toute médaille ayant son revers, chacune des options présente aussi des inconvénients. Du côté de Bastia, réaliser un score inférieur à celui du second tour des Territoriales de 2010, accréditerait l’idée qu’une part de ce résultat devait plus au vote-sanction contre son propre camp d’une droite dépitée qu’à une adhésion à l’autonomisme. De plus, devoir se maintenir ou se reporter exposerait à un choix périlleux : se brouiller avec les électeurs de droite ou de gauche, ce qui contrarierait la démarche siméoniste jusque là gagnante de rassembler toutes les bonnes volontés en quête de changement politique ou a minima de renouvellement des élus. Du côté de Corte, contribuer à une défaite de Paul Giacobbi compromettrait les rapprochements actuels entre la gauche et les nationalistes sur des dossiers comme le PADDUC ou l’évolution des institutions, et rendrait bien plus difficile la conclusion d’un contrat de mandature entre ces deux familles politiques lors des prochaines élections territoriales. Bien entendu, resterait alors à saisir l’option proposée par la Nouvelle Corse de Jean-Martin Mondoloni et certains cadres UMP comme Stéphanie Grimaldi et Marcel Francisci, d’un contrat de mandature Droite / Nationalistes.
Un front municipal très animé
Cependant si, à Bastia, Gilles Simeoni attend et consulte (ses amis et aussi, se dit-il, des « déçus » de la droite et du zuccarellisme), son mouvement passe à l’offensive contre la municipalité. Lors du dernier Conseil municipal, Inseme per Bastia a durement critiqué un manque de courtoisie et de transparence dans la programmation des travaux des commissions et le droit de l’opposition à l’information. En particulier, Inseme a dénoncé une propension à fixer certaines réunions de commissions aux mêmes dates que des sessions de l’Assemblée de Corse, et déploré que cela interdise à certains de ses élus d’y être présents. Puis, lors d’une conférence de presse, Inseme a dressé un véritable réquisitoire contre les politiques de la municipalité bastiaise et de la Communauté d’Agglomération de Bastia. La première cible a été la décision d’étendre les zones de stationnement payant et de revoir à la hausse les tarifs. En effet, à compter du 1er mars, des horodateurs deviendront opérationnels dans des artères jusque là épargnées (rues Miot et Gabriel Péri, boulevards Sebastiani et Graziani) et il faudra débourser 4 euros pour stationner en centre ville. Le tarif résident de 1,40 euro sera limité à un seul véhicule par foyer. La seconde cible a été la décision d’augmenter les tarifs d’occupation du domaine public jusqu’à 61%. Bien entendu, l’opposition ne s’est pas privée de dénoncer deux effets pervers : les salariés et les clients des activités de centre ville seront durement pénalisés ; s’ajoutant au manque criant de places et aux embouteillages permanents, toutes les augmentions contribueront à asphyxier le commerce proximité et les zones de chalandise et de loisirs du centre ville. Inseme a par ailleurs avancé des propositions : concertation, tarif résident pour toutes les voitures d’un foyer et les personnes travaillant à Bastia, tarif résident de 40 euros applicable dans tous les parkings souterrains, franchise d’une heure pour effectuer des achats, réglementation concertée des livraisons, parking provisoire boulevard Gaudin, parkings de dégagement aux entrées nord et sud de Bastia et plateformes multimodales permettant d’emprunter aisément le bus, le train ou le taxi. Une volée de flèches a par ailleurs été adressée à la politique intercommunale. Inseme a dénoncé l’abandon du projet de rocade Nord qui devait contribuer à fluidifier la circulation en centre ville. Le projet de piste cyclable (10 millions d’euros) a été jugé trop cher. Les autonomistes ont aussi réaffirmé leur volonté d’une extension du territoire et des compétences de la Communauté d’Agglomération de Bastia vers le sud (jusqu’à Casamozza). Enfin, Inseme a dénoncé une absence de transparence de la Ville de Bastia et des approximations de la Communauté d’Agglomération suite à une pollution du Vieux Port qui est intervenue il y a trois ans et qui a valu à l’établissement intercommunal d’être condamné à une forte amende. Dans le cadre du combat politique, Simeoni-Zuccarelli le front législatif reste calme, celui de la bataille municipale est d’ores et déjà très animé.
Pierre Corsi