Accueil du site > Actualites > Reportage CE CHARCUTIER SARDE QUI VEND DU JAMBON AUX MUSULMANS
 

Reportage CE CHARCUTIER SARDE QUI VEND DU JAMBON AUX MUSULMANS

jeudi 9 décembre 2010, par Journal de la Corse

Reportage Coupe de franceUn charcutier sarde a réussi là où la diplomatie internationale tente encore, sans succès, de mettre d’accord arabes et israéliens. Antonello Salis est un producteur heureux. Son entreprise, « La Genuina », est installée à Ploaghe, une petite ville de 5 000 habitants dans la province de Sassari. Son histoire remonte aux années 40 du siècle dernier. A cette époque la viande de mouton, (La Sardaigne possède le cheptel ovin le plus important d’Europe) ne servait que d’adjuvant aux diverses charcuteries. Aujourd’hui, grâce à Salis, elle est devenue une chair appréciée avec laquelle on produit des saucissons et des jambons suivant les recettes traditionnelles. Le jambon de brebis est une idée de Salis. Il est consommé de plus en plus par ceux à qui le porc est interdit. C’est ainsi que le charcutier de Ploaghe, conscient de la demande du marché et animé par la volonté de développer des produits locaux pour l’exportation a entrepris une démarche audacieuse : faire adopter ces produits par des communautés religieuses opposées sur presque tout, grâce à des procédés rituels qu’ont accepté ces communautés. Il n’a pas fallu longtemps pour que son entreprise bénéficie des plus notables certifications, la Casher et l’Halal. La Casher concernant la viande de brebis et de chèvre qui la rend consommable aux pratiquants de la religion hébraïque a été obtenue en mettant au point les procédées de découpage et de débit pratiqués sous la surveillance d’un rabbin. L’Halal pour les viandes et les jambons de brebis, de chèvre et de bœuf, animaux abattus directement par le « sacrificateur » sous la houlette de l’imam qui surveille également la chaîne de production afin que soient respectées la loi et la religion islamique. La conformité aux principes ethnico-religieux a fait bondir le chiffre d’affaires de « La Genuina » qui atteint actuellement 2 millions d’euro avec une exportation d’environ 95% et une prévision de 5 ME à l’horizon 2015. La charcuterie de Salis, qui affiche un haut niveau de qualité, est vendue dans les principales capitales européennes. Mais l’entrepreneur sarde a déjà organisé des réseaux en Allemagne, au Quatar et à Barhein. « Le marché des viandes charcutées et préparées selon des procédés conformes aux rites religieux représente en Europe quelque cinq milliards d’euro annuels » explique Salis qui pense qu’avec des produits innovants comme les siens, les espoirs de croissance sont illimités. Le jambon de brebis charcuté et fumé selon les recettes traditionnelles sardes est un jambon au goût plus affirmé que celui de porc, avec une saveur accentuée et forte comme le terroir d’où il provient. Selon les principes inspirés par la Bible, les juifs ne peuvent se nourrir de viandes provenant de la partie postérieure des animaux. Que fait alors Salis ? Il vend les postérieurs des brebis aux arabes et les parties antérieures aux israélites. Un ingénieux compromis commercial qui respecte les cultures et les religions à la satisfaction générale. Jean-Noël Colonna.

Répondre à cet article