Avec quatre accessions en division supérieure sur cinq candidats potentiels, la Corse a damé le pion a bien des régions de l’Hexagone, au terme d’une saison extraordinaire. Et derrière l’ACA, le SCB, le GFCOA et Calvi, d’autres clubs insulaires se sont maintenus dans une compétition nationale. Avec le retour-programmé- de la réserve de l’ACA et l’arrivée de Propriano, la Corse comptera, la saison prochaine, onze clubs répartis entre la L1 (ACA), le SCB (L2), le GFCOA (National), le CAB et Calvi (CFA) ainsi que le SCB et l’ACA (réserves), l’Etoile, Furiani, Corte et Propriano (CFA2). Seul, Borgo manque à l’appel de cette fabuleuse année. Une performance jamais égalée à ce jour qui extirpe notre football des vieux clichés dont l’affuble et qui ouvre, peut-être, d’autres horizons. À condition de bien négocier cette phase...
En août dernier, dix clubs étaient dans les starting-blocks dans leur compétition respective (ACA, SCB, GFCOA, CAB, Calvi, SCB2, Borgo, Etoile, Furiani, Corte). Sur les trois ténors du football insulaire, seul le SCB, relégué sans gloire de L2, semblait le plus enclin à relever le challenge de l’accession. Il n’avait, en fait, pas le choix. Accéder ou perdre le statut pro et, sans doute, retomber dans l’anonymat. En L2, l’ACA avait misé tout juste sur un maintien plus confortable que lors des saisons précédentes. Deux divisions au dessous, le CAB, basculé dans le groupe A de CFA songeait, avant tout, à conserver sa place. Le GFCOA comptait sur une nième accession en National qui lui avait filé entre les doigts une saison plus tôt. À dire vrai, personne n’osait parier un iota sur les « rouge et bleu ». Enfin, en CFA2, Calvi, nouvelle place forte du football balanin, entamait seulement sa deuxième saison consécutive à ce niveau. Corte songeait à poursuivre l’aventure dans une compétition qu’il connaît bien. L’Etoile et Borgo, nouveaux promus, visaient le maintien. De même que Furiani, sauvé in-extremis, une saison plus tôt.
Reçus quatre sur cinq !
Dix mois plus tard, le bilan de nos représentants dépasse les rêves des plus optimistes d’entre nous. L’ACA, l’un des plus faibles budgets de Ligue 2 fait son retour en Ligue 1 cinq ans après l’avoir quittée. Et même si les « rouge et blanc terminent en seconde position, cette saison restera, sans doute plus ancrée dans les mémoires que celle du sacre de 2002. La clé de la réussite ? Elle repose sur un recrutement judicieux, un état d’esprit irréprochable, des vertus chères au football corse et un groupe à l’identité renforcée. Mais l’ACA n’est que la plus haute marche d’un édifice où l’on retrouve d’autres clubs insulaires. On aura beau avancer que le SCB faisait figure d’épouvantail en National, il n’empêche que ce statut, il se l’est forgé, au fil des matchs dans une compétition peu évidente, de surcroît lorsque l’on vient d’être relégué de L2 six ans après avoir quitté l’élite. Le SCB doit, en grande partie, sa couronne et son retour en L2 à la grinta insufflée par Frédéric Hantz, sans doute l’homme qu’il fallait là où il fallait. En CFA, personne, parmi les plus fidèles supporters « rouge et bleu » n’auraient osé miser un euro sur le Gazelec, éternel candidat déchu à l’accession en National. Personne...excepté Dominique Veilex. Le coach ajaccien, qui a annoncé la couleur dès le mois de juillet, a su parfaitement situer les forces et le potentiel de son groupe. Un groupe, comme d’autres clubs insulaires, à l’identité renforcée et aux valeurs, certes, latentes, mais retrouvées et exprimées sur le terrain. Autant de paramètres conduisant le Gaz vers le National. Le CAB, lui, a manqué d’un cheveu, son billet pour le National. Longtemps leaders, les Cabistes ont sans doute perdu l’accession à Quevilly où ils menaient avant se faire rejoindre après d’interminables arrêts de jeu, et au Red-Star, à deux journées de la fin. Les hommes de Stéphane Rossi terminent, néanmoins, la saison en troisième position, ce qui constitue tout de même une sacrée performance. Enfin, dernier club en lice parmi les candidats à l’accession, le FC Calvi de Didier Santini, qui n’a laissé, malgré quelques frayeurs en fin d’exercice, aucune chance à ses poursuivants dans la course au CFA. Les Balanins ont dominé, de la tête et des épaules, la compétition et insufflé un rythme endiablé aux autres candidats. Leaders depuis la 12e journée, ils n’ont laissé que quelques miettes à leurs adversaires même si Marseille-Consolat est revenu sur leurs talons au lendemain de deux défaites consécutives face à Corte et à Nice. Les clubs insulaires sont donc reçus quatre sur cinq. Après analyse, deux paramètres important semblent être à l’origine de cette réussite.
Des valeurs retrouvées
Le premier est liés aux valeurs, retrouvées, du football insulaire avec pour chacun de nos représentants, un parcours à domicile intraitable. Chacun d’eux, à l’exception du Sporting (toutefois meilleure équipe à l’extérieur) et l’on peut même ajouter le CAB, termine l’exercice avec le statut de meilleure équipe à domicile. En L2, l’ACA remporte la palme avec 13 victoires, cinq nuls et une défaite. En National, le SCB termine 3e (14 victoires et 6 nuls) derrière Amiens et Guingamp mais première formation à l’extérieur. De son côté, le Gaz, en CFA, n’a pas fait de détails et façonné son accession sur un parcours quasi parfait à Mezavia (15 victoires et 2 nuls). Le CAB, malgré sa troisième place, termine, lui aussi, meilleure équipe à domicile (14 victoires et 2 défaites). Enfin, Calvi en fait de même avec 12 victoires, 2 nuls et 1 défaite). Chacun des stades insulaires est redevenu, comme le furent jadis Furiani ou Mezavia, une forteresse infranchissable où l’on respecte l’adversaire mais l’on ne craint personne. Cette caractéristique, et il s’agit là du deuxième paramètre expliquant la réussite de nos couleurs, se développe autour d’une équipe identitaire, à ossature insulaire avec un recrutement à chaque fois judicieux composé de joueurs épousant parfaitement le profil recherché. Le GFCOA a eu le courage, en pleine période de crise, de se séparer de certains de ces éléments incapables de se fondre dans le moule La Corse aura donc, la saison prochaine un représentant en Ligue 1, Ligue 2, National et deux en CFA ce qui est exceptionnel compte tenu du bassin de population dont dispose l’île et de son nombre-restreint- de licenciés. Derrière ces quatre fers de lance, on ne saurait oublier, également, le bon comportement des autres équipes insulaires engagées en compétition nationale. Dans le groupe A de CFA2, le SCB a, certes, longtemps tremblé mais il est parvenu à terminé sur les chapeaux de roues. Dans le groupe H, l’Etoile (11e) et Furiani (13e) ont assuré leur maintien en toute fin de championnat. Corte (10e) a souffert mais s’installe dans la durée. Enfin, Borgu, longtemps à la lutte, a lâché à quelques encablures du port. Une relégation mais deux accessions, celles de l’ACA qui aura donc une réserve en CFA2 et de Propriano, qui effectue sa première apparition à ce niveau. Enfin, et malgré son décalage encore trop important entre l’aspect « fête-spectacle » proposé et la réalité quotidienne de notre football, ses exigences et ses besoins, la victoire de la « Squadra Corsa » sur la Bulgarie vient compléter ce joli tableau.
Philippe Peraut