Le truculent athlète insulaire a fêté, comme il se doit, la semaine dernière, ses soixante dix ans. Au milieu de ses amis et de sa famille, il a décidé de faire soixante dix fois le tour de la place Foch. Une heure et trente deux minutes pour parcourir, dans la liesse générale, 19,9 kilomètres. Une perf qui valait d’être soulignée.
Les as de la macagna ne manquent pas dans la vieille ville, à Ajaccio. De la rue Fesch à la Calata en passant par u carrughju drittu ou le Domu, les truculents personnages ne se comptent plus. C’est à l’un d’entre eux, le coiffeur Jean-Paul Costa, que l’on doit le pari osé, la semaine dernière, par le non moins truculent Jean-Pierre Arrighi : faire soixante dix fois le tour de la places des Palmiers, une façon, bien à lui, de souffler ses soixante dix bougies.
Un événement médiatisé
Sa silhouette longiligne, sa calvitie « affirmée », ses moustaches lui conférant des allures de lord anglais et, bien sûr, sa passion pour la course à pied (quantu averà fattu chilometri dapoi ch’ellu hè zitellu ?) en ont fait un personnage à part dans le milieu du sport insulaire. Et Jean-Pierre a choisi le jour de la cérémonie d’ouverture des JO pour marquer son événement. Ainsi, tous, familles et amis se sont retrouvés place des Palmiers devant des dizaines de touristes ébahis, conscients qu’il se passait quelque chose de peu ordinaire, acclamant, eux aussi, à la fin, leur idole d’un jour, saluant, eux aussi, par des « Jean-Pierre, Jean-Pierre » et des salves d’applaudissements, le parcours de cet illustre coureur. Un événement salué, comme il se doit par la presse locale. Sur les ondes de Frequenza Mora, notre confrère et ami, Thomas Brunelli n’a-t-il pas, annoncé, toute la journée, ce rendez-vous ? Les micros et caméras de France 3 Corse sont là tout comme un journaliste de Corse-Matin. À leurs côtés, Simon Renucci, u sgiò merre, l’un de ses adjoints, François Casasoprana, André Paccou (Ligue des droits de l’homme) et Marie Jo Joly, responsable locale de l’association France Alzheimer sont là pour le départ. On retrouve des anciens du quartier, notamment Petru d’Orazio, et une population ajaccienne qui fait une halte avant de se rendre au traditionnel shopping de nuit. Au beau milieu des stands où l’on peut savourer crêpes et gaufres, un véritable QG a été dressé. Concocté par Géraldine, sa fille et tenu par Lisandrina et Faustina, ses deux petites filles, on y retrouve, sous le regard d’Huguette, son épouse, des tee-shirts à son effigie et marquant ses 40 et 50 ans de courses. Georges Baldovini prend le chrono, et Géraldine va assurer, durant une heure et demie, le rafraichissement de son père. Ce dernier a pris soin, au préalable, d’avaler trois figues sèches, histoire de tenir la distance.
Rendez-vous dans dix ans
Enfin, comment passer sous silence « l’ouverture-balai » effectuée, une heure et demie durant par Charles Luccioni dont la voix retentit encore sur la place des Palmiers. Au son des « Ecartez-vous », « Laissez passer », « On applaudit », « Allez, allez », il a harangué la foule (impressionnant quelques touristes qui ont avalé leur crêpe de travers !) et ouvert le passage à l’illustre Jean-Pierre. 20h02 : une heure trente et 19,9 kilomètres plus tard, notre personnage emblématique franchit la ligne d’arrivée, devancé par son ami Charles Luccioni, en nage (on se demande, si, finalement, il n’a pas parcouru autant de kilomètres que lui). Une arrivée dans la liesse générale. Emu, Jean-Pierre a simplement commenté « Sa » victoire par des « Merci, merci à tous » et donné rendez-vous en 2022 pour ses 80 ans. En cette période de JO, il aura montré, dans une compétition sportive où, quoiqu’on en dise, le professionnalisme règne en maître, que les valeurs intrinsèques du sport restent intactes et qu’il les a véhiculées, le temps de relever ce défi. Coubertin aurait certainement apprécié…
Ph.P.