Autrans-en-Vercors, 9 février 2011, début d’après-midi. La piste principale de la station de sports d’hiver reçoit les très jeunes compétiteurs et compétitrices d’un slalom géant. Ils n’ont pas encore dix ans. La moins âgée en a à peine cinq. C’est elle, pourtant, qui remportera l’épreuve après avoir slalomé sans faute, sur une distance dépassant les 500 mètres, en 1 minute, 21 secondes et 19 centièmes.
Les moniteurs n’en reviennent pas. Ses parents non plus. Maëlys Pietri, la championne, ne se rend pas très bien compte de son exploit. Mais elle apprécie l’ovation qui lui est faite. A-t-elle vraiment le ski dans le sang, un sang mêlé de corse et d’ukrainien ? Sans doute, mais elle a aussi de qui tenir. Son père, David, Bastiais d’origine, entrepreneur de travaux d‘accès difficile, est un skieur confirmé. Sa mère, Macha, l’est aussi. Née à Lviv, une ville de l’Ouest ukrainien, française après son mariage, elle s’est spécialisée dans le tourisme, organisant notamment des stages de langues russe et chinoise pour les professionnels de la montagne. Ils vivent à Villard-de-Lans, autre station de sports d’hiver du Vercors, à quelque mille mètres d’altitude. Maëlys, encore à l’école maternelle, où elle collectionne les bons points, fait du ski depuis sa deuxième année. Elle a déjà gagné trois étoiles, rarissime à son âge, mais elle est encore plus fière du trophée qui lui a été remis à l’issue de sa victoire, l’autre jour à Autrans. Qu’a-t-elle de plus à son actif ? Elle parle déjà couramment le français et le russe, et, un jour de pluie sa maitresse l’a entendue fredonner devant une fenêtre de sa classe : « Piove, piove, a gallina ha fattu l’ove... » une chanson qui lui était inconnue mais que son élève avait parfaitement intégrée, l’accent corse en plus. Que dire encore de cette étonnante petite fille ? Que l’escalade lui est familière pour la pratiquer régulièrement, avec ses parents, dans les montagnes proches de sa maison et qu’elle apprend aussi à nager, en mer, sur les plages de la Haute-Corse pendant les vacances d’été. Son petit frère, Lucas, qui n’a pas encore deux ans a chaussé les skis, cet hiver, sans savoir qu’il pourrait, un jour, se hisser au niveau de sa sœur et, peut-être même la dépasser. Pour l’heure, c’est Maëlys qui tient la corde. En la voyant évoluer sur les pistes de Villard, un ami de la famille s’est exclamé : « C’est une championne en herbe ! » Et le père de répliquer dans un sourire : « Pas en herbe, en titre ! »
J-N.C.