L’Edito d’Aimé Pietri
Un indépendantiste pur et dur s’étonnait, l’autre jour, en voyant des jeunes corses vibrer aux exploits des équipes françaises de football et approuver la décision de François Hollande d’envoyer des troupes au Mali. Il se demandait comment on pouvait applaudir aux succès et aux initiatives du colonisateur dont on sait –disait-il- qu’il continue d’oppresser sournoisement cette île et son peuple, toujours en quête de liberté. Le même enthousiasme et la même fierté peut se vérifier d’ailleurs toutes les fois que la France s’illustre dans d’autres domaines. Les Corses ne sont pas alors avares de louanges. Comme s’ils s’identifiaient parfaitement à ce pays dont pourtant ils ne partagent l’histoire que depuis deux siècles et demi. Une telle identification se vérifie, d’ailleurs, dans l’expression culturelle et même la langue corse dont on saluait naguère l’authenticité, ne semble retrouver une certaine vigueur que dans le calque français que ses locuteurs usent et abusent la rendant par là même très éloignée de ses véritables origines. Et ce n’est pas tout puisque, depuis longtemps, pour le Corse il n’est bon bec que de Paris. C’est donc sur cette capitale qu’il se dirige lorsqu’il veut atteindre une promotion sociale au dessus de la moyenne et qu’il espère s’enrichir aux deux sens du terme. Là aussi qu’il envoie ses enfants se forger un destin. Là enfin que, sans le dire, il met sa confiance et fonde ses espoirs. Et si demain, par on ne sait quel hasard, la Corse allait se laisser tenter par l’aventure séparatiste, la France serait toujours présente dans les structures mentales, une présence résistant à tous les lavages de cerveau imaginables. Si tant est qu’on puisse les organiser. La révolution à laquelle aspirent les tenants de « l’Autre Corse » reste encore confinée à leurs rêves. Il lui faudra du temps pour les dépasser. Beaucoup de temps.